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Trump, candidat naturel du Parti républicain en 2024 ?

CHRONIQUE. L’aura de l’ancien président n’est plus aussi forte dans son camp. Mais qui osera défier la bête politique et affronter la fureur de ses supporteurs ?

Donald Trump a prononcé, mardi, son premier discours à Washington depuis qu’il a quitté la Maison-Blanche.

La presse américaine y voit son retour dans la vie politique, ce qui est curieux dans la mesure où il ne l’a jamais vraiment quittée. Non seulement il n’a cessé de commenter les événements et d’apporter son soutien à des candidats républicains aux élections locales, mais il hante, qu’il le veuille ou non (et il le veut !), les réflexions de la droite américaine. Il la hante d’abord de manière idéologique dans la mesure où il a introduit une autre manière de faire de la politique, sur le fond comme sur la forme. Son héritage populiste, fait de rupture en comparaison des politiques conservatrices traditionnelles, de violence verbale et de controverses permanentes, est une tentation à laquelle peu de jeunes politiciens républicains résistent aujourd’hui. Quel que soit le candidat républicain en 2024, il y a donc fort à parier qu’il suivra une feuille de route « trumpienne ».

Mais Trump hante aussi son parti avec la question de son avenir personnel. Nul ne doute qu’il ne veuille prendre sa revanche en 2024. Or, à droite, ce ne sont pas seulement ceux qui rêvent de concourir qui s’en inquiètent, mais aussi tous les analystes qui craignent que le « tout sauf Trump », qui a largement expliqué la victoire de Biden en 2020, ne se renouvelle en 2024. Au-delà même des frontières du Parti républicain, une large majorité d’Américains exprime le vœu qu’il ne se représente pas.

Doutes, conseils, analyses des uns et des autres, soyons assurés que Trump n’en a cure. Le narcissique pathologique qu’il est ira de l’avant s’il le peut. En d’autres termes, sauf ennui de santé ou judiciaire, il nourrit l’intention ferme de se venger de ceux qui lui ont « volé » sa réélection en 2020, ce dont il reste persuadé, quelles que soient les preuves irréfutables en sens inverse. Il sera donc candidat. La question n’est pas là.

Elle est d’abord dans sa capacité à emporter les primaires républicaines. Certes, les plus modérés dans son propre parti ne veulent pas de lui ; certes, il est apparu, mardi, à Washington, sans flamme et n’y a fait que répéter ses antiennes habituelles qui, dépouillées de sa verve et de ses provocations, sont bien plates ; certes, des politiciens ambitieux plus jeunes que lui reprennent avec talent ses recettes, que ce soit le gouverneur de Floride, DeSantis, le sénateur du Texas, Cruz, ou d’autres. Mais oseront-ils l’affronter alors que l’emprise de Trump sur les militants de leur parti reste forte ? Oseront-ils susciter sa vindicte alors qu’ils peuvent plus sûrement se positionner pour sa succession quatre courtes années plus tard ? Déjà, beaucoup évoquent un ticket Trump-DeSantis pour 2024.

Si les républicains en faisaient leur champion, pourrait-il battre son adversaire démocrate ? Écartons d’abord l’obstacle de l’enquête parlementaire sur l’invasion du Congrès, le 6 janvier 2021. Il y a longtemps que les Américains soit s’en désintéressent, soit en ont conclu qu’il s’agissait d’une manœuvre politique pour essayer de salir le président sortant. Pour bien des républicains, ce n’est qu’une répétition des deux procédures de destitution lancées par les démocrates contre Trump, qui n’ont pas abouti, où ils ne voyaient qu’une tentative de l’establishment de revenir sur la victoire électorale de 2016. Les auditions au Congrès n’intéressent que ceux qui sont déjà convaincus. Si les procédures débouchaient sur une mise en cause judiciaire de Trump, le risque de violences serait d’ailleurs grand dans le pays, tant quantité d’Américains en seraient indignés.

Les insuffisances de Biden

D’ici à 2024, de l’eau politique aura coulé sous les ponts. Heureusement pour les démocrates qui, confrontés aujourd’hui à une inflation galopante et à l’augmentation de la criminalité, risquent de le payer cher aux élections législatives de novembre 2022. Il est probable qu’ils y perdront le contrôle d’une ou des deux Chambres. Ils peuvent affirmer que c’est injuste, qu’inflation et criminalité sont l’héritage de leurs prédécesseurs, mais ce qu’ils ne peuvent pas contester, c’est l’incapacité de Joe Biden à galvaniser les Américains. Un pays en crise n’a pas besoin d’un sympathique grand-père aux lapsus et aux oublis qui se multiplient, mais d’un « commandant en chef » qui indique la voie et convainc qu’on le suive. Déjà, en 2020, grâce au confinement imposé par le Covid-19, beaucoup pensaient qu’il ne l’avait emporté car il n’avait pas eu à mener vraiment campagne. Alors en 2024 ? Pourra-t-il réellement se représenter comme il l’annonce ? Dans ce cas, à 82 ans, avec ses dérapages cognitifs, fera-t-il le poids face à un Trump qui, certes, aura 78 ans, mais qui reste, contrairement à lui, une « bête de scène », pleine de brutalité et d’énergie ?

La plupart des experts écartent Kamala Harris, la vice-présidente, en affirmant qu’elle a échoué dans un poste, il est vrai, ingrat. Pourquoi pas un autre candidat démocrate, un sénateur ou un gouverneur dans un pays où un quasi-inconnu peut l’emporter, comme Carter, Clinton ou Obama l’ont démontré en leur temps ? En tout cas, pour la gauche américaine, le temps presse, comme le prouvent certains commentaires où perce la panique d’une victoire de Trump ou d’un simili-Trump en 2024.

LE POINT