Sept mois et demi après le début de l’invasion russe en Ukraine, le conflit reste englué dans l’est du pays. Emmanuel Macron a appelé mercredi soir Vladimir Poutine à « cesser cette guerre » et revenir « à la table des discussions ». Une issue qui paraît encore lointaine, explique sur LCI Gérard Araud, ancien ambassadeur de France aux États-Unis, qui ne voit dans aucune des deux parties la volonté immédiate de « trouver une issue diplomatique ».
« Dans une guerre, c’est le champ de bataille qui décide », indique-t-il (voir la vidéo en tête de cet article). « De mon avis de diplomate, les deux parties ne sont pas dans une position de négocier. Il est très bien que le président de la République garde ce fil ténu avec Vladimir Poutine, pour voir si, le moment venu, la négociation est possible. Mais elle ne l’est pas aujourd’hui, car les Ukrainiens espèrent avancer et gagner, tandis que les Russes doivent rétablir la situation. »
La Turquie au centre du jeu ?
D’après Gérard Araud, « le plus vraisemblable, hélas, est que nous ayons devant nous plusieurs semaines et mois de combats ». « À partir d’un certain moment, soit il y a belligérant vainqueur et un vaincu, soit les deux sont épuisés et négocient. Mais il peut aussi y avoir la poursuite éternelle de la guerre », craint l’ancien ambassadeur. « Quand Poutine dit qu’il est prêt à négocier, il met comme condition que l’Ukraine capitule. Nous sommes beaucoup plus dans une période de raidissement de la Russie qu’une Russie prête à négocier dans des conditions raisonnables pour l’Ukraine. »
Toutefois, l’hypothèse d’une « médiation » a commencé à émerger mercredi du côté de Moscou, alors que Vladimir Poutine doit rencontrer son homologue turc Recep Tayyip Erdogan ce jeudi. « Erdogan va probablement officiellement proposer quelque chose », a déclaré à la presse le conseiller diplomatique du Kremlin, Iouri Ouchakov. « Si des contacts (russo-ukrainiens) devaient avoir lieu, ils se feraient sur le territoire » turc.
« Depuis le début du conflit, Erdogan a réussi à conserver une sorte d’équilibre entre les deux belligérants », salue Gérard Araud. « La Turquie fournit des armes à l’Ukraine, mais a aussi une frontière avec la Russie. Elle est obligée de faire une sorte de ‘funambulisme diplomatique’. C’est elle qui a négocié la sortie des céréales ukrainiennes », rappelle-t-il.
L’Ukraine, « peut-être la première d’autres guerres qui viennent »
Des négociations entraînant la fin de la guerre dans des termes convenant à l’Ukraine et à la Russie restent toutefois hypothétiques. « Lorsque vous négociez, vous ne pouvez pas gagner à 100%, l’autre doit aussi obtenir quelque chose », poursuit l’ancien diplomate.
« Au début de la guerre, le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait montré qu’il était prêt à un compromis. Étant donné les victoires ukrainiennes, ce compromis n’est plus de mise. La question centrale est : que décidera le champ de bataille ? Car si Vladimir Poutine avoue sa défaite, sa survie politique sera en jeu », conclut Gérard Araud, qui craint que cette guerre en Ukraine « soit peut-être la première d’autres guerres qui viennent ».