La France a besoin d’un gaullisme 2.0

Dans nos démocraties, la politique étrangère est rarement un facteur décisif d’une campagne électorale. Il n’y a aucune raison qu’il en aille différemment en avril 2022 en France. Parions donc que, dans les débats qui précèderont les deux tours de la présidentielle, on lui réservera un strapontin en fin de soirée, ce qui permettra aux candidats de s’en tirer par des généralités et des approximations, comme ce fut le cas en 2017.
Pourtant, les citoyens auraient le droit de demander plus de précisions sur la politique étrangère qu’entendra conduire le vainqueur а un moment où le monde change d’ère. De 1945 à 1990, la France avait pu être « le braconnier de la guerre froide », alliée des Etats-Unis mais non alignée sur toutes leurs politiques dans ce que certains ont appelй la « synthèse gaullo-mitterrandienne » fondée sur quatre éléments : la fidélité aux alliances, l’engagement européen, le maintien d’une voix singulière et l’ouverture sur le monde. L’effondrement du bloc communiste a remis en cause cette liberté de manoeuvre puisqu’il n’y avait plus qu’une superpuissance. La France s’y est adaptée sans perdre son autonomie.

Cela étant, la réalité était celle d’une hégémonie américaine dont il fallait s’accommoder comme l’a prouvé le fait que, quelle que soit la résistance justifiée de la France а une entreprise aussi stupide et illégale que l’invasion de l’Irak en 2003, elle a dû ensuite, comme la Russie et la Chine, endosser le protectorat américain dans ce pays. Dans ce contexte, Jacques Chirac avait, dès 1995, envisagé de rejoindre la structure militaire de l’Otan ; Nicolas Sarkozy l’a fait en 2008. La France n’était pas devenue « néo-conservatrice » comme le prétendent certains. Elle s’était adaptée au monde tel qu’il était. Voilà qu’elle doit le faire de nouveau.

Le Point