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Débat Harris-Trump

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LA CHRONIQUE DE GÉRARD ARAUD. À moins de 70 jours de l’élection, Kamala Harris et Donald Trump entrent dans leur dernière phase de campagne.

Le 5 novembre, dans sept semaines, les Américains iront aux urnes pour élire leur président, l’ensemble de la Chambre des représentants et un tiers du Sénat. Les deux candidats ont entamé la dernière ligne droite, qui les mènera au résultat final. Comme d’habitude, nos amis américains nous ont offert le scénario d’une série télévisée où l’intérêt rebondit à chaque épisode. Qu’on en juge : il y a un mois, le président sortant Joe Biden, qui ne cessait de réitérer sa décision de se représenter, a subi de telles pressions de ses prédécesseurs démocrates et de son entourage qu’il s’est retiré en catastrophe alors que tous les sondages annonçaient déjà sa défaite comme inéluctable.

Seul candidat concevable à ce stade tardif de la campagne, la vice-présidente Kamala Harris, qui était jusqu’ici la cible privilégiée des critiques de l’appareil du Parti démocrate, devait soudain prendre le relais alors que plus de 40 % des Américains étaient incapables de donner son nom en réponse à une question sur son poste.

Pour corser le tout, une tentative d’assassinat aux dépens de Donald Trump échouait de peu et lui donnait l’occasion de prouver son énergie sur une photo qui faisait le tour du monde. Le chaos d’un côté, la détermination de l’autre : les jeux semblaient faits.

Comment les démocrates se sont relancés
Eh bien non ! Kamala Harris, la mal-aimée de l’establishment démocrate, a réussi son entrée en campagne. Les électeurs de son parti ont repris confiance ; l’argent s’est mis à couler à flots – plus d’un demi-milliard de dollars en quelques semaines – dans les caisses de la campagne ; s’y ajoute le choix heureux d’un vice-président qui semble sorti d’un film de Hollywood des années 1950 où tout le monde est sympathique – à part le méchant, qui meurt à la fin. L’espoir a changé de camp.

Par ailleurs, les démocrates ont réussi à faire de leur convention une fête dominée par l’optimisme et l’unité retrouvée du parti. Le risque était de renouveler sur Gaza la convention de 1972, également à Chicago, où les manifestants hostiles à la guerre du Vietnam avaient bouleversé les débats et donné l’image d’un parti à la dérive, soumis à l’influence des extrémistes. Nixon avait été alors réélu dans un raz-de-marée.

Mais cette fois, tout est resté relativement sous contrôle ; les incidents ont été limités. On retiendra donc de cette grande fête les discours de la candidate, qui est restée au niveau des généralités, et des deux géants du parti au mieux de leur forme, Bill Clinton et Barack Obama. Le premier s’est payé le luxe de rappeler qu’élu président il y a trente-deux ans, il était encore aujourd’hui plus jeune que Donald Trump. La machine de guerre est en ordre de marche.

Trump marque le pas, mais Harris est loin d’avoir gagné
Donald Trump, qui avait fondé sa campagne sur la sénilité supposée de son adversaire, est pris de court : c’est lui désormais le vieillard incohérent. Par ailleurs, il a choisi un coéquipier idéologue d’extrême droite qui fait fuir l’électorat féminin, déjà échaudé par la position des républicains sur l’avortement. Il ne sait plus trop comment attaquer son adversaire et n’évite pas les dérapages sexistes ou racistes. Il ne lui reste plus qu’à la décrire comme une communiste… Le rythme de ses meetings s’est ralenti ; sa campagne marque le pas.

Les démocrates ont donc fait mieux que sauver les meubles : ils ont remonté la pente. Les sondages donnent désormais les deux candidats au coude-à-coude. La plupart accordent une légère avance à Kamala Harris dans le suffrage au niveau national, mais ce n’est pas assez : pour être élue, du fait du collège électoral, elle devrait réunir 51,5 à 52 % de l’électorat.

Quel que soit l’enthousiasme réel qui entoure la candidature de Kamala Harris, dont les médias généralistes se font les échos complaisants, les sondages par État sont trop contradictoires pour garantir la victoire de l’un ou de l’autre. Toujours est-il qu’ils sont encore aujourd’hui plus favorables à Donald Trump qu’ils ne l’étaient à la même époque en 2016 et 2020.

Mes contacts au Parti démocrate m’ont d’ailleurs confié que leurs études ciblées sur certaines populations ou certains quartiers étaient toujours « préoccupantes ». Ils s’inquiètent en particulier du glissement qui se confirme des latinos. Ces populations d’origine sud-américaine continuent de passer en nombre croissant du côté des républicains.

Un déficit de reconnaissance à rattraper
Enfin, la candidate démocrate souffre encore d’un déficit de reconnaissance dans le pays alors qu’en revanche, évidemment, tout le monde connaît Donald Trump. Il va lui falloir y remédier à coups de meetings à travers l’immensité américaine. Or, jusqu’ici, elle a soigneusement évité de donner des conférences de presse et est restée relativement discrète sur la substance de son programme. Il faut sans doute y voir la crainte de faire apparaître la division du Parti démocrate entre une gauche de plus en plus revendicative et les modérés.

LE POINT