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Gérard Araud – La crise existentielle du Parti républicain américain

CHRONIQUE. Donald Trump sort affaibli des élections de mi-mandat et se voit désormais contesté en interne. Où va le grand parti de la droite américaine?

Les républicains sortent des élections de mi-mandat non seulement déçus d’un résultat médiocre mais divisés.

Les trumpistes et les conservateurs classiques s’affrontent, les seconds accusant l’ancien président d’être responsable de l’échec. Il est vrai que les uns et les autres ne se sont jamais beaucoup aimés. Trump en a humilié beaucoup à coups d’insultes et de menaces publiques qu’il leur fallait subir sans broncher, comme l’a souvent éprouvé, à ses dépens, le leader de la droite du Sénat, Mitch McConnell.

Inversement, Trump s’est jugé trahi lorsque la grande majorité des républicains du Congrès a refusé de contester l’élection de Joe Biden en janvier 2021. Au-delà de ces considérations personnelles, c’est l’intégration du logiciel populiste qui soulève des oppositions au sein d’un parti de notables qui n’en apprécie que modérément les excès. La victoire était le seul moyen de consacrer ce mariage de raison. Qu’elle vienne à manquer et le divorce menace.

Voilà donc la droite traditionnelle qui se rebelle. Il est vrai qu’elle dispose enfin d’un champion qui paraît capable d’arrêter Donald Trump dans sa marche triomphale vers la nomination du parti pour la prochaine élection présidentielle : Ron DeSantis, qui vient de se faire réélire gouverneur de Floride avec près de vingt points d’avance. DeSantis, c’est Trump sans les foucades erratiques du maître. Le groupe de médias de droite que possède la famille Murdoch, qui comprend notamment la première chaîne de télévision du pays Fox News, le New York Post et le Wall Street Journal, s’est d’ailleurs immédiatement mis en ordre de bataille derrière lui en attaquant sans concessions son ancien chéri, Donald Trump.
Le temps presse : l’ancien président avait prévu de confirmer, dès le 15 novembre, sa candidature à la nomination républicaine pour l’élection de 2024. Initialement, son plan était de profiter du succès électoral du parti pour en revendiquer la paternité et, sur cette base, s’imposer d’entrée de jeu comme le seul candidat légitime à droite. Ses adversaires essaient de l’en dissuader en arguant des résultats médiocres des élections dans l’espoir qu’il renonce ensuite à l’aventure. Mais Trump n’est pas du genre à se soumettre… Comme m’a dit un ami militant de ce parti, « il y aura du sang sur les murs »…

La question de l’avortement

Mais les malheurs du Parti républicain vont au-delà de la gestion de Donald Trump. Selon les sondages, pour un quart des électeurs, la question de l’avortement a joué un rôle central dans leur vote et parmi eux, 80 % ont choisi les démocrates. La suppression de la protection constitutionnelle de l’avortement par la Cour suprême et les restrictions, voire l’interdiction, qu’ont alors votées les États républicains ont suscité une vive réaction dans l’opinion publique où 70 % des Américains sont favorables à ce droit. Les jeunes et les femmes se sont, en particulier, mobilisés et ont voté en plus grand nombre que d’habitude. Les républicains découvrent le danger que représente pour eux leur identification à la droite religieuse, mais il leur est difficile de s’en dégager tant elle représente une partie importante de leur électorat et tant elle est intransigeante sur cette question.

LE POINT